Le rossignol de Seddouk s’est éteint

Le chanteur Azerzour, de son vrai nom Mohand Bouzerzour, est décédé dans la matinée d’hier, à l’âge de 72 ans, des suites d’une longue maladie. Le chanteur a rendu son dernier souffle à l’hôpital de Sidi Aïch, où il était hospitalisé depuis cinq jours. Auteur, compositeur et interprète, qui a marqué la chanson kabyle de son empreinte, le défunt laisse derrière lui des chansons qui lui survivront certainement encore longtemps. Tamaâyt id yehka vava (L’histoire que m’a racontée mon père) est la plus connue, c’est un chef-d’œuvre qui a marqué les esprits des mélomanes par sa beauté.

La mélodie et la poésie profonde de ce titre, comme celles de bien d’autres chansons d’Azerzour, subjuguent toujours des admiratifs, qui ne connaissent pas forcément l’identité de celui qui les interprète. Mohand Bouzerzour a vécu dans la modestie et la discrétion, loin des feux de la rampe, parmi les siens à Seddouk Oufella, son village natal, qu’il a tant chanté et où il sera enterré demain à midi. Seddouk fellak Atsghanigh l’avait lancé au début des années 1970, où il a tapé dans l’œil même du grand Cherif Kheddam.

Sa rencontre avec le défunt chanteur Cheikh El Mahdi, mort lui aussi à l’hôpital de Sidi Aïch le 30 décembre 2009, compte dans son parcours artistique. Ceux qui l’ont connu et côtoyé décrivent un homme «attachant et cultivé».

La chanson n’a pas été un gagne-pain

La chanson n’a pas été un gagne-pain pour Mohand Bouzerzour, enseignant de français, mais un plaisir qu’il a su partager admirablement avec amour et sérieux avec son public. De son vivant, il avait témoigné qu’il a puisé son art du patrimoine culturel de sa mère. Très estimé, de sa voix au timbre particulier, il a construit une carrière de 40 ans dans la chanson kabyle et a démarré, d’un pas mesuré, depuis la troupe de son village et la toute première guitare qu’il a possédée en 1967. Il a fallu, cependant, attendre 1990 pour voir le premier produit musical d’Azerzour sortir du studio. Tamaâyt a alors fait sensation et porte le cachet tout particulier d’Azerzour. En 1998, le chanteur crée une chorale dans son village natal et enregistre son album en 2008. En 2015, Mohand Bouzerzour sort son quatrième album, qui clôture la carrière d’un artiste atypique respecté, qui écrit et compose ses musiques dans la sagesse, la réflexion et la méditation.

Mohand Bouzerzour, que l’on appelle affectueusement Da Mohand dans son village, vient de nous quitter, en laissant derrière lui un répertoire riche, que l’on ne se lassera pas d’écouter, en passant le flambeau à deux de ses enfants qui continueront à perpétuer l’amour de la chanson kabyle qui a été celui de leur père.

Kamel Medjdoub

source: El Watan du 18/07/2017

Laissez nous

 Laissez-nous

Au nom du Ciel, au nom de nos ancêtres, au nom des morts et des vivants, au nom d’hier, d’aujourd’hui et de  demain, au nom de chaque pouce de cette terre meurtrie .Avant qu’il ne soit trop tard, laissez-nous avancer, courir, voler, rattraper notre destin. Laissez-nous grandir, bâtir, conquérir, marquer le monde de notre empreinte.
 Laissez-nous être. Entendez-vous ces immenses clameurs?
Ressentez-vous cette force prodigieuse ? Quel rêve ne pourrions-nous  réaliser? Quelle montagne ne  pourrions-nous déplacer? Nous ignorons l’impossible Nous avons soif de changer le monde. Qu’est-ce qui peut nous arrêter, nous faire rouler, nous faire peur ?  Rien ni personne .Nous avons des millénaires  d’énergie  à dépenser .laissez-nous .Il est temps .Il y a si peu entre la sagesse et la folie, le bonheur et le malheur, l’espoir et le désespoir, la vie et la mort.
Au nom du ciel, au nom de nos ancêtres, au nom des morts et des vivants, au nom d’hier, d’aujourd’hui et de demain, au nom de chaque pouce de cette terre meurtrie. Avant qu’il ne soit trop tard.  
 
 
 
Par Mohand Bouzerzour

 

L’Algérie d’en bas et l’Algérie d’en haut

L’Algérie d’en bas et l’Algérie d’en haut

A moins de garder son journal plié, il est franchement difficile de garder le sourire. Car, chaque jour que Dieu donne, que peut-on y lire ? Attentats terroristes : tant de morts, tant de blessés – Recrudescence de la criminalité et de la délinquance – Démantèlement d’un réseau de trafic d’armes – Un commerçant kidnappé – Scandales financiers en série – Saccage d’un bar – Violentes émeutes ont … – Taux de suicide en hausse. Et d’autres joyeusetés du même genre.

A propos de suicide, il y a moins d’un mois, le jeune Yacine ADJAOUD de Tibouamouchine, âgé de 29 ans s’est donné la mort par pendaison. Toute la région est encore sous le choc. Il était si plein de vie. Paix à son âme.

Fort heureusement pour nos cœurs malmenés et notre morale torturé que le JT de 20H de la planète ENTV est là pour chasser nos angoisses et nous faire voir l’avenir en rose.

C’est que dans l’Algérie d’en haut, complètement déconnectée de celle d’en bas, tout baigne dans l’huile : pas de terrorisme, pas de scandales financiers, pas de chômage, aucun problème sérieux. Tout va pour le mieux dans le meilleur des mondes.

A un détail près, tous les JT de l’unique sont identiques, si bien que seule la date peut vous permettre de discerner celui du 1er janvier de celui du 31 décembre de la même année.

Remarquez que pour les névrosés que nous sommes, à condition bien sûr, de respecter scrupuleusement le traitement annuel qui est de trois fois par jour, il n’y a pas de remède plus efficace pour lutter contre ce terrible mal qu’est le stress national qui n’arrête pas de nous ronger.

Cette année, nous sommes particulièrement gâtés. Jugez-en. Le JT s’ouvre chaque fois, évidement, sur les éternelles réceptions, messages et discours lénifiants du président. Ensuite c’est le ballet incessant de nos ministres débordants d’activité, qui dans un chantier, qui dans une zaouia (nos universités), qui dans une enceinte culturelle, détournée de sa fonction initiale pour les besoins d’un meeting.

Mais la nouveauté, la cerise sur le gâteau, c’est notre ministre de la culture. Madame TOUMI qui me fait penser, toutes proportions gardées, à notre légendaire Na Ourdia Oussiamar animatrice de toutes les fêtes de la région. De concert en exposition, de représentation théâtrale en soirée littéraire, notre ministre est partout portant à bout de bras ALGER CAPITALE DE LA CULTURE ARABE 2007.

Hé oui ! Après L’ANNEE DE L’ALGERIE EN FRANCE pour prouver notre FRANCITE, voilà venue l’heure d’exhiber notre ARABITE.

Le coup d’envoi de cette immense zerda, la plus grande depuis l’indépendance, a été donné le 12 janvier, 1er jour de l’an berbère. Choix judicieux n’est ce pas ?

Car il faut savoir que depuis 45 ans, nos dirigeants éclairés ne ménagent aucun effort ni ne lésinent sur aucun moyen humain, matériel ou financier pour mener à terme une mission unique au monde ; celle de réussir la construction d’un peuple sous-serre avec ses constantes nationales, ses repaires historiques, sa langue officielle et sa religion d’état.

Et nous de l’Algérie d’en bas, ingrats que nous sommes, qui continuons à nous agripper de toutes nos forces comme des naufragés à notre algérianité. Nous devrions en avoir honte.

Enfin, juste pour retrouver le sourire et à propos de scandales financiers, je vous laisse apprécier cette fable de Jean de la Fontaine « le laboureur et ses enfants » que j’ai adaptée juste pour rire durant les années 70. Je me souviens que je l’avais proposée à l’époque au journal EL-MOUDJAHID qui n’a pas jugé utile de la publier.

Le voleur et ses enfants

Chapardez prenez de la graine
ce sont les poches qui manquent le moins.
Un pauvre voleur sentant sa mort prochaine
Fit venir ses enfants, leur parla sans témoin :
« Gardez-vous, leur dit-il, de négliger l’héritage
Que nous ont laissé nos passants ;
Un trésor est caché dedans.
Je ne sais pas l’endroit
Mais un peu de furetage vous le fera trouver.
Fouillez ! Volez ! Piquez ! Ne laissez nulle place
Où les doigts passent et repassent ».
Le père mort, le fils vous détroussent les gens,
De-ci, de-là, si bien qu’au bout de l’an,
Ils se retrouvent en cage
D’argent point de gagné
Car le père ignorant
Oublia avant sa mort
La corruption d’abord.

Seddouk Oufella, le 15 mars 2007

Mohand BOUZERZOUR

Entre ciel et terre

Entre ciel et terre

Azul ! Désolé pour ce trop long silence mais le quotidien platonique de ces derniers temps a de quoi désespéré les meilleurs plumes. Cet étourdissement est certainement dû au fait que nous soyons trop longtemps exposés au soleil cette année. C’est que l’été a envahi l’automne qui, lui, semble vouloir se venger sur l’hiver. En attendant la réaction de ce dernier, Dame Pluie, à travers une prière nationale, a été sollicitée pour une réconciliation (encore une autre) entre les belligérants mais bizarrement et pour des raisons non encore établies notre capricieuse invitée reste sourde à notre appel préférant s’épandre en discours d’apaisements à partir des territoires européens. Faut-il croire que cette désaffection est due à un problème de visa, d’insécurité ou au phénomène de l’émigration ? Ainsi donc, après la fuite des artistes, puis des cerveaux voilà venir celle des nuages ? Ah !non ! C’est trop ! Notre prochaine prière nationale devra être une protestation des plus énergique contre ces mécréants de Roumis qui nous ont volé nos nuages. C’est un comble ! Non contents de polluer l’atmosphère et de perturber la planète, ils veulent que nous en payions les conséquences. Non mais !…

Bref, notre ciel étant désespérément bleu, je redescends du dernier nuage restant pour vous entretenir de ce qui se passe ici-bas.

Commençant par l’entame des travaux de réhabilitation de l’histoire de Cheikh Aheddad, figure de proue de l’Insurrection du 08 avril 1871 qui semble avoir sorti le village de sa léthargie. Plusieurs chantiers sont à pied d’œuvre. La restauration de la maison des Khouans et le terrassement de l’assiette où s’érigera le mausolée qui doit recevoir les cendres du martyr et de ses deux fils Aziez et M’hand vont bon train. Quant à la légendaire fontaine Tala Aïcha, elle est en train de se refaire une beauté à la pierre taillée, la coquette. Notre photographe attitré, Omar Bensaadoune, se fera un plaisir de satisfaire votre curiosité visuelle ; j’en suis sûr. Il adore ça et il ne manque pas de savoir faire.

Un autre chantier, communal celui-là, a pour tâche la réalisation de la 2ème tranche du projet d’élargissement du chemin Timechmachine.

Sur le plan culturel, le village a eu le plaisir d’accueillir une équipe de Radio Soummam dans le cadre de l’émission «Portrait de mon village» sous le houlette du sympathique Karim Cheikh. Ainsi donc, en présence de MM le maire et ses adjoints et entouré de notabilités du village, de membres de l’association de jeunes et des artistes locaux dont Na Ourdia Ousiamar et votre serviteur, l’animateur, avec beaucoup de tact et de maîtrise a su, en l’espace d’une heure, faire connaître le village en particulier et la commune en général sous toutes leurs coutures.

A propos de la commune et comme je vous le disais dans mon précédant ramage un comité des fêtes de la ville de Seddouk, que je j’ai l’honneur de présider, a été créé. Notre ambition est de redynamiser la culture dans toute sa diversité et sur tout le territoire de la commune. Mais hélas ! La culture n’étant pas comestible et suscitant plus de méfiance que d’enthousiasme nous attendons que l’on nous laisse travailler. Nous en reparlerons.

Quant à la cueillette des olives, j’allais l’oublier tant la récolte est maigre cette année. Dommage, la fête sera pour une autre fois. Toutefois, méditez avec moi ce triste paradoxe que nous offre ce noble symbole de paix et de fécondité qu’est l’olivier. N’est-ce pas que plus il se montre généreux plus il reçoit des coups de bâton ?

Allez, joyeuses fêtes et bonne année !

Seddouk Oufella, le 03 décembre 2006

Mohand BOUZERZOUR

Tamaayt@yahoo.fr

Ramadhaniettes

Ramadhaniettes

par Mohand Bouzerzour

Il est parti. Sir Ramadhan a tiré sa révérence laissant la vie diurne reprendre ses droits. C’est avec un réel pincement au cœur que nous avons dû nous séparer du mois sacré particulièrement cette année tant il a été généreux et sympathique. En effet, une heure après la rupture du jeûne, c’est l’effervescence totale ; tout le village est dehors. Les ruelles, la place et la mosquée grouillent de monde. Que de cris, de rires, de mouvements … Au cœur de voix des fidèles psalmodient le coran en entonnant des chants liturgiques répercutés par les hauts parleurs de la mosquée se mêlant le brouhaha de la place, les cris des gens qui s’interpellent, les éclats de rires et le claquements des dominos, Archem ! Awid âachrin ! Tout ça accompagné de l’odeur du thé à la menthe, de Quelb-ellouz et autres gâteries. Trente nuits de fêtes an attendant l’Aïd…

A l’autre bout du village, au café-théâtre de Tchoupa, c’est une autre ambiance. Tous les amoureux de la musique et de la chanson s’y donnent rendez-vous. Pratiquement, deux à trois fois par semaine bonjo, violon et mondole se donnent la réplique et les artistes de la région se relaient au grand bonheur des jeunes et moins jeunes. En guise de cerise sur le gâteau, une agence de tourisme n’a pas trouvé mieux que de jeter son dévolu sur notre village. C’est ainsi que nous avons eu le plaisir de recevoir plus de 80 touristes dont la majorité sont américains ; mais il y avait aussi des allemands, des suisses, des italiens, des japonais, des australiens des deux sexes. Les jeunes de l’Association du village dont la dénomination est désormais Tarwa n Sedduq ” au lieu de ” Isulas ” s’est surpassée en cette heureuse occasion. Nos visiteurs étaient comblés. Et comment ne pas l’être en effet, quand tout le village se mobilise pour vous accueillir ? Arrivés la veille de l’Aïd vers 14 h sous une forte escorte des services de sécurité, ils ont été scindés en trois groupes avec pour guides les jeunes universitaires du village maniant parfaitement la langue de Shakespeare. Nos hôtes ont eu d’abord à visiter une maison berbère traditionnelle avec son Adaynin, Taâricht, Lekder, et ses Ikoufan et là, ils ont dansé au rythme du bendir de notre légendaire NA OURDIA OU SIÂMAR, puis ils eu à visiter la maison de Cheikh Aheddad où une exposition de photos, portraits et documents leur a permis d’avoir un aperçu sur cet illustre personnage et son insurrection du 08 avril 1871 contre le colonialisme français. Pour clore une visite de plus de deux heures, une collation leur été offerte. Ils ont eu à faire connaissance avec l’art culinaire berbère à travers plus d’une dizaine de plats traditionnels : Aghroum sous toutes ses facettes, le couscous, Tiâasbanin, Adhemmin etc … Emporté par l’ambiance du moment et voulant montrer aux visiteurs comment déguster une figue sèche avec de l’huile d’olive, l’un des guides n’a pas hésité à joindre le geste à la parole précipitant ainsi la rupture du jeûne de près de deux heures sous les rires indulgents des présents. Nos touristes ravis sont repartis vers 16 h 30 accompagnés de gestes d’adieux de toute la population. Et pour couronner cette fabuleuse période de la vie du village, décision fut prise d’organiser une Timechret (louziâa) et une soirée musicale et théâtrale la veille de l’Aïd. Tous les nécessiteux du village ont été pris en charge grâce à un don de 90.000,00 DA provenant d’un … jordanien. Hé oui ! Nous avons même eu l’honneur de compter le Directeur de Radio Soummam parmi les participants de louziâa. Quant à la soirée artistique, il fallait voir ! Une réussite totale ! Ils sont venus de partout. Le dit lieu El bordj était inondé de monde. Les chanteurs et comédiens ont rivalisé de talents pour donner de la joie à un public connaisseur et reconnaissant. Ça a chanté dansé jusqu’à 3 h du matin. Enfin et toujours dans le domaine culturel, un comité communal des fêtes a été créé et me voilà président. Je vous en parlerai plus tard … au prochain ramage –

A bientôt.

Seddouk Oufella, le 27 octobre 2006

Bruits et chuchotements

Bruits et chuchotements

par Mohand Bouzerzour

Il est 14 h en ce neuvième jour de Ramadhan. Il fait trop chaud ; seul un gros nuage cotonneux, presque à portée de main, orne un ciel tout bleu. En bas, le roux et le jaune dominent donnant au paysage cette beauté triste et tranquille de l’automne. Septembre le trouble fête est reparti. Après avoir chasser les émigrés avec les dernières figues fraîches, fait taire le joyeux tintamarre des cortèges nuptiaux et des fêtes nocturnes et renvoyé les enfants sur le chemin de l’école, il inaugura le mois de Ramadhan et s’en alla à son tour avec le sentiment du devoir accompli cédant la place à Octobre pour gérer la suite et préparer le fête de l’Aïd Ameziane.

A propos du Ramadhan, les seuls à se frotter les mains sont les commerçants. Les pères de famille, eux, après la saignée de la rentée scolaire, doivent faire face aux caprices du mois sacré avant d’être achevés par les ruineuses et inévitables exigences de Sir l’Aïd Ameziane.

Au village, les journées sont molles et sans consistance et les nuits peu ambiantes. Heureusement que Zoubir Tchoupa a eu l’heureuse initiative d’ouvrir un café au lieu dit Torna. Jusqu’à 22 h c’est les jeux : dominos, cartes … Après, place à la musique. Presque chaque soir, c’est un concert – Qaâda- . L’endroit est devenu le point de ralliement de tous les chanteurs de la région et le public y est de plus en plus nombreux.

Pour joindre l’utile à l’agréable, il convenu avec les Notables et l’Association de jeunes du village de couronner le mois de Ramadhan par l’organisation d’une Louziâa et d’une soirée artistique au grand bonheur de tous. Amen !

Un mot sur les jeunes. Avec leur nouveau comité, fraîchement installé, ils semblent disposés à redynamiser leur Association. Cette semaine, nous les avons accompagnés au musée d’Ifri pour une visite d’étude. Au retour, une commission de prospection a été créée. Elle a pour mission de recueillir tout ce qui peut alimenter le futur musée de Cheikh Aheddad (documents, photos, objets etc … )

Voilà pour l’essentiel. Au prochain ramage.

Seddouk Oufella, le 02 octobre 2006

Mohand BOUZERZOUR

Enfer et paradis

Enfer et paradis

Deux mois de silence, c’est long, trop long même, je l’avoue. Cependant, vous devez savoir qu’outre une paresse dont je n’ai aucune envie de me défaire tant elle me sied, des événements récents tant sur le plan national que mondial ont provoqué en moi une déprime que j’ai du mal à surmonter à ce jour.

Pourtant, à la veille de l’Aïd Amokrane et du nouvel an, c’est à dire fin décembre 2006, tout semblait concourir à fortifier l’espoir de l’avènement d’un monde meilleur : une semaine printanière en plein hiver, toutes les maisons de Dieu ouvertes et remplies de fidèles redoublants de ferventes prières, les enfants habillés de neuf, le mouton, la dinde … Tout était réuni pour faire de cette divine coïncidence du calendrier le jour de la REDEMPTION. La planète entière était en liesse. Et comment ne pas l’être quand on s’apprête à recevoir, pour la première fois depuis plus de quinze milliards d’années, la visite de deux envoyés de Dieu ? En effet, MOHAMMED et JESUS (Que le Salut soit sur eux), nous en étions certains, allaient saisir cette heureuse circonstance pour venir, la main dans la main, nous rendre visite et intercéder pour nous auprès du TOUT PUISSANT.

Hélas ! Mille fois hélas ! Au lieu du mouton et de la dinde, nous crûmes plus intelligent de leur offrir en guise de sacrifice celui d’un homme par pendaison. Horrifiés, nos deux prophètes s’en retournèrent en pleurs désespérés de la race humaine et résignés quant au sort que nous réservons à cette merveilleuse planète.

L’être humain, ce monstre prédateur, ce microbe qui aspire à accéder au PARADIS à travers ses mosquées, ses églises, ses synagogues et autres temples ignore-t-il qu’il y est déjà et que par sa folie, il est en train de la détruire ? Et combien même il existerait un PARADIS dans l’au-delà, il suffit qu’il y pénètre pour le transformer en ENFER.

Cela me rappelle les paroles d’un penseur français dont le nom m’échappe. « Le passé me hante, le présent me tourmente et l’avenir m’épouvante » Puisse Dieu avoir pitié de nous.

Désolé de paraître aussi pessimiste mais c’est aussi une manière de secouer les consciences. J’en profite pour vous livrer les paroles d’une de mes chansons qui me semble traduire assez fidèlement une certaine angoisse.

Yir tirga “Cauchemars”

A yayetma ugade? Ô mes frères, j’ai peur

N?antt-iyi yir tirga Par des cauchemars, je suis hanté

A yayetma ugade? Ô mes frères, j’ai peur 

A-y-tentt-id-yawi uzekka Que demain puisse les ramener

Urga? asirem ittemmat J’ai rêvé l’espoir qui se meurt

Urga? afrux s snasel J’ai rêvé un oiseau enchaîné 

Urga? tedder?el tafat J’ai rêvé la lumière aveugle 

Urga? ddunit temxel J’ai rêvé le monde en folie

Urga? lheq yettewwat J’ai rêvé la justice martyrisée

Urga? yettru l?aqel J’ai rêvé le sage en pleurs

Urga? igenni yenzef J’ai rêvé le ciel à sec

Urga? akal ye??uqer J’ai rêvé la terre stérile 

Urga? sseha tekref J’ai rêvé la santé paralysée 

Ttargu? le?ra d cc J’ai rêvé le dénuement et la famine

Urga? l?aba tezlef J’ai rêvé la forêt calcinée

Ulac aman di lebher J’ai rêvé l’océan tari

Urga? w-i-d yedsan d l?ib J’ai rêvé que sourire était indécent

Lkuli?at akw ?elqen J’ai rêvé les écoles fermées 

Urga? ddunit d axrib J’ai rêvé le monde en ruine 

Urga? at rebbi feq?en J’ai rêvé les saints en colère

Urga? tudert tettkwerrib J’ai rêvé la vie agonisante

Ula d Rebbi urga? yehzen Et même Dieu était triste. 

Seddouk Oufella, le 1 mars 2007

Mohand BOUZERZOUR