Enfer et paradis
Deux mois de silence, c’est long, trop long même, je l’avoue. Cependant, vous devez savoir qu’outre une paresse dont je n’ai aucune envie de me défaire tant elle me sied, des événements récents tant sur le plan national que mondial ont provoqué en moi une déprime que j’ai du mal à surmonter à ce jour.
Pourtant, à la veille de l’Aïd Amokrane et du nouvel an, c’est à dire fin décembre 2006, tout semblait concourir à fortifier l’espoir de l’avènement d’un monde meilleur : une semaine printanière en plein hiver, toutes les maisons de Dieu ouvertes et remplies de fidèles redoublants de ferventes prières, les enfants habillés de neuf, le mouton, la dinde … Tout était réuni pour faire de cette divine coïncidence du calendrier le jour de la REDEMPTION. La planète entière était en liesse. Et comment ne pas l’être quand on s’apprête à recevoir, pour la première fois depuis plus de quinze milliards d’années, la visite de deux envoyés de Dieu ? En effet, MOHAMMED et JESUS (Que le Salut soit sur eux), nous en étions certains, allaient saisir cette heureuse circonstance pour venir, la main dans la main, nous rendre visite et intercéder pour nous auprès du TOUT PUISSANT.
Hélas ! Mille fois hélas ! Au lieu du mouton et de la dinde, nous crûmes plus intelligent de leur offrir en guise de sacrifice celui d’un homme par pendaison. Horrifiés, nos deux prophètes s’en retournèrent en pleurs désespérés de la race humaine et résignés quant au sort que nous réservons à cette merveilleuse planète.
L’être humain, ce monstre prédateur, ce microbe qui aspire à accéder au PARADIS à travers ses mosquées, ses églises, ses synagogues et autres temples ignore-t-il qu’il y est déjà et que par sa folie, il est en train de la détruire ? Et combien même il existerait un PARADIS dans l’au-delà, il suffit qu’il y pénètre pour le transformer en ENFER.
Cela me rappelle les paroles d’un penseur français dont le nom m’échappe. « Le passé me hante, le présent me tourmente et l’avenir m’épouvante » Puisse Dieu avoir pitié de nous.
Désolé de paraître aussi pessimiste mais c’est aussi une manière de secouer les consciences. J’en profite pour vous livrer les paroles d’une de mes chansons qui me semble traduire assez fidèlement une certaine angoisse.
Yir tirga “Cauchemars”
A yayetma ugade? Ô mes frères, j’ai peur
N?antt-iyi yir tirga Par des cauchemars, je suis hanté
A yayetma ugade? Ô mes frères, j’ai peur
A-y-tentt-id-yawi uzekka Que demain puisse les ramener
Urga? asirem ittemmat J’ai rêvé l’espoir qui se meurt
Urga? afrux s snasel J’ai rêvé un oiseau enchaîné
Urga? tedder?el tafat J’ai rêvé la lumière aveugle
Urga? ddunit temxel J’ai rêvé le monde en folie
Urga? lheq yettewwat J’ai rêvé la justice martyrisée
Urga? yettru l?aqel J’ai rêvé le sage en pleurs
Urga? igenni yenzef J’ai rêvé le ciel à sec
Urga? akal ye??uqer J’ai rêvé la terre stérile
Urga? sseha tekref J’ai rêvé la santé paralysée
Ttargu? le?ra d cc J’ai rêvé le dénuement et la famine
Urga? l?aba tezlef J’ai rêvé la forêt calcinée
Ulac aman di lebher J’ai rêvé l’océan tari
Urga? w-i-d yedsan d l?ib J’ai rêvé que sourire était indécent
Lkuli?at akw ?elqen J’ai rêvé les écoles fermées
Urga? ddunit d axrib J’ai rêvé le monde en ruine
Urga? at rebbi feq?en J’ai rêvé les saints en colère
Urga? tudert tettkwerrib J’ai rêvé la vie agonisante
Ula d Rebbi urga? yehzen Et même Dieu était triste.
Seddouk Oufella, le 1 mars 2007
Mohand BOUZERZOUR