Retour du cheikh Aheddad à Seddouk Oufella

Une ré-inhumation historique

 

A voir l’immense foule qui a affronté un soleil de plomb, ce vendredi, à Seddouk Oufella, pour assister à la cérémonie de ré-inhumation des ossements de Cheikh Aheddad et ceux de son fils Aziz, c’est à croire que le vénérable savant et révolutionnaire est mort hier seulement.

La veille, à l’arrivée des cercueils en provenance de Constantine, une atmosphère empreinte d’une très forte émotion se lisait sur le visage de toute l’assistance massée à l’entrée du village pour accueillir les restes des héros. Les youyous stridents des femmes et les chants liturgiques des « khouan » montaient très haut dans le ciel et contribuaient à donner une forte charge affective à un événement qui avait des allures de rendez-vous avec l’histoire. « Nous avons ramené mêmes les dalles qui recouvraient son squelette et la terre de sa tombe », nous dira l’un des ses descendants, ému jusqu’aux larmes. Cheikh a été enterré selon la coutume musulmane alors que Aziz, décédé à Paris en 1895, a été enseveli dans un cercueil de métal qui était encore plombé.

Ultime « ziara »

A l’arrivée à Seddouk Oufella, une équipe spécialisée a procédé au transfert des ossements de Aziz vers un cercueil plus seyant. Un cercueil symbolique a été réservé à Cheikh Mhand dont le lieu de sépulture reste à ce jour inconnu. Toute la journée et tout le long de la soirée les visiteurs se sont succédé devant les trois cercueils pour un dernier hommage et une ultime « ziara ». Il faut dire, cependant, que depuis sa mort en 1873, la maison du cheikh n’a jamais arrêté de recevoir des « khouans » de toutes les contrées et des citoyens venus solliciter sa baraka. Ils franchissent la porte d’entrée, en s’inclinant et en prononçant la formule rituelle : « Swanouz a cheikh Aheddad ». Le vendredi, outre les cortèges des officiels, ce sont des milliers de citoyens qui affluaient vers Seddouk Oufella, venant de toutes les régions. Les représentants de plus de 400 zaouïas disséminées à travers le pays ont également répondu à l’appel du cœur.

Vibrant hommage

La cérémonie de ré inhumation a eu lieu après la prière des morts et celle du vendredi. Les trois cercueils, portés par des éléments de la protection civile, ont été acheminés vers l’esplanade du mausolée qui a été récemment construit pour abriter les trois tombes. Un détachement de l’armée nationale était présent sur les lieux pour présenter les armes aux trois martyrs. Après la prise de parole d’un membre de la famille Belhaddad qui a tenu à remercier tous ceux qui ont permis le retour des ossements du cheikh, le secrétaire général de la présidence a donné lecture du message personnel du Président de la république qui a rendu un vibrant hommage au cheikh tout en soulignant son rôle, sa place et son importance dans l’histoire du pays. Ainsi donc, avec le retour des ossements du cheikh, l’érection d’un mausolée appelé à se transformer en lieu culturel dont la mission principale sera de préserver la mémoire du cheikh, le projet d’un musée portant son nom, Cheikh Aheddad retrouve sa place naturelle dans une Algérie pour laquelle il a sacrifié toutes ses possessions, ses biens, sa zaouïa, sa vie et ses propres enfants.

Par Djamel Alilat