Seddouk, une ville coloniale

La région de SEDDOUK est montagneuse. Les villages Kabyles : SEDDOUK Oufellah (d’en haut) – SEDDOUK Ouadda (en bas) ou encore TIBOUAMOUCHINE sont bâtis sur le versant du Djebel TROUNA lequel culmine à plus de 1.000 mètres d’altitude.En 1871, résidait à SEDDOUK Oufellah le vieux Marabout CHEIKH EL HADDAD Mohand Améziane, chef religieux respecté des RAHMANIA.L’appel à la guerre sainte que lui arracha son fils Si AZIZ, au marché du 8 Avril 1872, souleva en quelques jours les tribus des deux Kabylies en une formidable insurrection que les seuls efforts de MOKRANI n’auraient certainement pu entraîner.Dès le 13 Avril 1872, le Vice Amiral GUEYDON, Gouverneur Général Civil de l’Algérie, prenait l’arrêté prévoyant " La création d’un centre de population française sur la rive droite de l’Oued SAHEL, au lieu dit SEDDOUK, à 70 Kms de BOUGIE.Ce n’est qu’entre 1881 et 1883 que SEDDOUK Centre, village situé sur un vaste plateau à 375 m d’altitude, dominé par les villages Kabyles cités plus haut, rattaché à la Commune Mixte d’AKBOU, allait prendre corps, après quelques problèmes.C’est ainsi que le Journal " LE PETIT COLON ALGERIEN " du Lundi 7 Mars 1881 publiait l’article dont extrait ci-après  * LE MIRIFIQUE CAS DE SEDDOUK

-Nous recevons d’un colon de SEDDOUK, les curieuses révélations suivantes qui complètent celles que nous avons déjà publiées sur la situation extraordinaire des malheureux colons du village. " En Décembre 1880, mise en location aux enchères publiques des terres séquestrées.
En même temps, mise en possession immédiate de 10 lots de ferme isolée.
En Février 1881, le Géomètre en Chef de BOUGIE assigne leurs limites des lots aux colons.
En même temps, le Domaine fait ratifier l’adjudication faite de ces mêmes terres.
on ne saurait trop admirer la touchante entente qui règne entre ces divers aimables fonctionnaires.
Si les colons ne sont pas installés dans un délai de 6 mois, ils seraient évincés. Mais ils auront droit à la jouissance de leur terre que le 1er Octobre. C’est à dire dans 9 mois.
Quant aux locataires, ils ont sous loué les terres aux indigènes, et n’ont fait aucun travail, aucune dépense.
il est intolérable de voir ainsi se jouer des intérêts de la colonisation des fonctionnaires qui ont pour mission de protéger les colons. "

L’installation du village qui comprenait 71 lots urbains suivit son cours à l’instar des autres villages de colonisation.Cependant, les mariages religieux ne pouvant être célébrés qu’à AKBOU ou BOUGIE en l’absence d’une église, la construction de celle-ci était sollicitée par les colons auprès du Gouverneur Général par pétition du 10 Octobre 1888 :" Nous soussignés, colons et habitants du Centre de SEDDOUK. , sur 52 attributaires primitifs, plus de 40 résident encore au village, qui remplissent fidèlement leurs obligations. L’édification de nombreux bâtiments, plantation de 40 Ha de vigne, attestent à SEDDOUK la présence d’une population définitivement assise… mais au dessus des besoins matériels, existent des besoins moraux… et en première ligne, se trouve le besoin d’un culte religieux. c’est pourquoi nous désirons voir une église s’élever au milieu de notre village. "

suivaient 34 signatures : TEMPIER – CATELAN – BEOLET – DAVID – ROUSSEL – ROUCHER – HEINRICH – JOSEPH – MATHIEU – GIRARDON – VYRIER – AMBLARD – ARMAND – AMARDEILH – ANDRIEUX – BOUVET – CHACHERER- GEGER et d’autres illisibles.

L’église Sainte THERESE fut édifiée dans les années suivantes. Durant les " évènements " la messe y était célébrée deux fois par mois par le Curé d’AKBOU… L’Abbé RIESER fut enlevé le 15 Février 1959 par les fellagahs sur la route AKBOU-SEDDOUK… Il fut délivré 10 jours plus tard dans la région d’AZAZGA par une Unité de Chasseurs Alpins.             En raison de son développement et de l’insistance de ses habitants, SEDDOUK devint après la l’ guerre mondiale Commune de Plein Exercice, avec pour Maire Monsieur GROSS, instituteur en retraite. Le dernier Maire en 1962 fut Monsieur Louis CAUPERT.
Le village était à l’écart de l’axe routier RN 26 BOUGIE – ALGER, et de la ligne des Chemins de Fer Algériens qui longeait la SOUMMAM. Depuis SEDDOUK, la route départementale 23 tout en lacets permettait d’accéder à la Gare des CFA de TAKRIETZ à 9 kms plus bas. Une autre départementale reliait SEDDOUK à AKBOU.
Le village était implanté sur un terrain pentu. Il était dominé au Sud-Est par le Djebel TROUNA (+ 1.000 m) et du Sud-Ouest au NordOuest et au-delà de la Vallée de la SOUMMAM par le décor grandiose du DJURDJURA.
Le point culminant du village était occupé par le Bordj. Dans son enceinte se trouvaient la Mairie et le Groupe Scolaire.
A proximité se tenait le marché tous les samedis. Les fellahs des douars environnants descendaient avec nombre d’ariouls (bourricots) seul moyen de locomotion approprié. Ces ariouls entretenaient à longueur de journée un vacarme assourdissant par leurs braiements ininterrompus…
En contre partie des fruits et légumes apportés et vendus par les Kabyles ; ceux-ci regagnaient leurs douars, en fin de marché, les ânes lourdement chargés de leurs propres acquisitions.
En plein air les " bouchers " exposaient la viande de mouton sans aucune protection à l’assaut des guêpes et des mouches qui revenaient à la charge sitôt chassées.
Au centre du village se trouvaient la place, la poste, un café maure et divers commerces. Quant au jardin Public, il était irrégulièrement entretenu et pratiquement toujours fermé.
Dans une autre rue se trouvaient la Section Administrative Spécialisée – l’A.M.G. (Aide Médicale Gratuite) et plus loin le Lavoir, l’abreuvoir et l’Eglise qui n’était pas très éloignée de la Mosquée.
Le village n’avait pas de Monument aux Morts, mais comptait de nombreux Anciens Combattants Kabyles. Parmi ces derniers Mr DJEBARI qui parcourait le village en proposant La Dépêche de CONSTANTINE ou le journal d’ALGER. Il fut choisi pour participer au défilé d’un 14 Juillet à PARIS…
Au recensement de Mars 1946, la Commune comptait 5.953 habitants parmi lesquels une vingtaine de familles européennes, dont celles des 6 Gendarmes et de l’instituteur.
Dans les années 1950, de nouveaux bâtiments étaient construits :
1 Ecole comprenant une dizaine de classes, où 400 enfants étaient scolarisés.
1 Centre Social qui accueillait soixante adolescents.
1 Mairie.
1 Foyer Sportif avec création d’une équipe de Footbal.                                                       
A noter à SEDDOUK Ouadda (en bas), l’école dirigée par Mr A. COTTET éditait un journal scolaire "NOUVELLES D’UN PITON KABYLE " imprimé et rédigé par les élèves des Cours Elémentaires et Moyens pour leurs correspondants métropolitains. – Année Scolaire 1946-47 Exemple d’un article
Le Mendiant.
Un jour, Larbi le mendiant est venu demander l’aumône.Arrivé à la porte de ma maison, je lui ai donné un morceau de galette. Mon chien a mordu Larbi. Ahmed C.E. 1
Dans les environs : Salines de LEMLLAH, ou village du sel, où cinq familles Kabyles exploitaient 20 cuvettes en terre dans lesquelles le sel était recueilli après évaporation de l’eau. Cette production était vendue dans la région.La Commune de SEDDOUK avait une superficie de 5.695 Hectares. Les principales cultures étaient : l’Olivier, le Figuier et le
Caroubier.
En 1962, il restait environ un Hectare de Vigne.La production d’huile d’olive était importante ainsi que le commerce de figues sèches et de caroubes.                   

Louis AYMES
Bibliographie
– Avec la collaboration de César SIX.
– Guide Hachette.
– Archives AIX-EN-PROVENCE
– Souvenirs