Dirigé par Tassadit Yacine, membre du laboratoire d’anthropologie sociale au Collège de France et directrice d’études à l’Ecole des hautes études en sciences sociales de Paris, ce colloque réunira de grosses pointures des universités européennes à l’instar de l’historien Benjamin Stora et de l’essayiste Georges Morin, fondateur de l’association contre le racisme antimaghrébin Coup de Soleil et directeur du Maghreb des livres, de Françoise Vergès, du Gold Smith’s Collège de l’université de Londres, connue pour ses travaux sur l’esclavage colonial, des artistes de renom comme le cinéaste Mehdi Lalaoui, et la comédienne Virginie Aimone.
De nombreux universitaires et écrivains d’Algérie spécialistes de l’histoire coloniale comme Abdelmadjid Merdaci, Slimane Zeghidour, l’écrivain Rachid Oulebsir ou encore Samia Messaoudi, apporteront une vision intérieure et une lecture plus locale de ce que la mémoire collective a retenu de cet épisode historique qui a jeté les premiers fondements de l’algérianité. Une quinzaine d’intellectuels des deux rives de la méditerranée déclineront durant deux jours des thèmes centrés sur les origines de l’insurrection, son contexte historique et les drames qui s’étaient joués dans le camp des vaincus, les destructions de villages et d’institutions cultuelles comme les zaouias, les humiliations, les impositions répressives, le séquestre collectif des terres, les déportations de populations vers la nouvelle Calédonie, la Guyane française et la Corse… A coté des thèmes généralistes, figurent au programme également des monographies sur des lieux de mémoires de cette insurrection comme Seddouk, le village duquel est partie la révolte le samedi 8 avril 1871 sous la houlette du cheikh Aheddad, maître de la confrérie Rahmania, le village de Lakhdaria (ex-Palestro), les hameaux de Jijel, les collines de Medjana, territoire des Mokrani, les portes de fer à l’orée du Hodna, et des témoignages recueillis dans la haute vallée de la Soummam… Une exposition d’art donnera à voir au public durant deux jours les œuvres du photographe Salah Oudaha. A coté des conférences-débats, une pièce de théâtre sera jouée et un film projeté. Le collectif Manifeste rien jouera avec Virginie Aimone et Jeremy Beschon les Trois exils, un texte écrit par Benjamin Stora qui met en scène la condition humaine à travers un pan de l’histoire de l’Algérie. Le public aura le loisir de débattre avec les acteurs et l’auteur du texte. Le film de Mehdi Lallaoui les Kabyles du pacifique, reconstitue le périple des déportés de 1871 ayant fait souche dans le pacifique. Cette histoire croise le destin de trois populations de déportés, les Kabyles, les Communards de Paris et les Kanaks. Le débat autour du film sera animé par l’auteur et modéré par l’écrivaine Wassyla Tamzali. Organisé dans un lieu public ouvert, ce colloque s’adresse aux citoyens en dehors du carcan élitiste universitaire, aussi les planificateurs, à leur tête le musicologue Malek Bouchebah, ont-ils vu grand, veillant au grain sur le plan logistique pour garantir un séjour confortable à tous les invités. Des ballades touristiques autour de Béjaïa sont programmées pour joindre à l’utile l’agréable.
Rachid Oulebsir